En effet, durant ces trois belles journées, j'ai expérimenté une fois de plus ce que peuvent vouloir dire ces deux mots : accueil et confiance.

Accueil : durant les deux jours passés dans la paroisse Saint Roch à Gap, je n'ai pas eu le loisir de prendre un seul repas au presbytère. Rassurez-vous, ceci n'est nullement pour cracher sur l'hospitalité du curé de cette belle paroisse, par qui j'ai été accueilli avec une simplicité et une bonté pour lesquelles je le remercie de tout mon coeur, mais parce que, à tous les repas, nous avons, Charles (le séminariste qui m'a suggéré de passer ce début de vacances avec lui) et moi, ainsi que le Père Frère (non, ce n'est pas une blague, quel beau nom pour un prêtre !), été accueillis chez des paroissiens.
Je suis profondément heureux d'être accueilli ainsi au repas familial : le sens du mot convivialité, tellement galvaudé parfois qu'il est devenu synonyme analogiquement de concon-catho-gentil-mais-chiant dans ma famille, retrouve alors pleinement son sens. A de nombreuses reprises, en de nombreux endroits, j'ai été accueilli simplement, avec une joie vraie et forte, une joie profondément humaine qui ne se cache pas d'avoir plaisir à faire plaisir ; et pas seulement comme séminariste, mais aussi comme ami, comme voisin, comme personne de passage parfois, tout naturellement. J'aurais beaucoup de noms mais n'en mettrai que quelques-uns, mais je garde les visages et les personnes dans mes souvenirs, et ce sont des souvenirs heureux et pleins d'action de grâce. De fait, il me semble que cette joie est profondément chrétienne, même si elle n'est pas vécue que par des personnes qui se disent chrétiennes, même si elle n'est pas donnée qu'au nom du Christ. Profondément humaine parce que profondément chrétienne, et vice-versa. Il est donc naturel d'en remercier le Seigneur, et cela n'enlève rien à ceux qui en sont remerciés, ici comme sur le moment.
Que les paroissiens de Saint Roch, dont je ne sais s'ils me liront jamais, en soient ici vivement et chaleureusement encore remerciés ! Je prie le Seigneur qu'ils sachent toujours montrer, à l'étranger de passage comme aux personnes toujours présentes mais un peu à part de leur paroisse, le visage du Christ qui aime chacun comme une personne unique et qui l'accueille comme telle. Comme ça. Gratos.
Que les Petites Soeurs de la Consolation de Draguignan soient elles aussi profondément remerciées pour leur accueil si simple et si religieux, dans le bon sens du terme : j'ai été frappé par leur jeunesse de coeur, leur joie, leur vie toute simple et évangélique - cela va de toute manière ensemble. En rentrant le soir dans le train pour Paris, j'ai été frappé du contraste de tous ces gens coincés sur leur ordinateur ou leur I-pod, fermés sur eux-mêmes, surpris et immédiatement sur la défensive face à mon sourire pourtant pas si agressif...
Un grand merci encore à la Maman de Mathilde, qui saura bien se reconnaître (Mathilde, je compte sur toi pour qu'elle lise au moins ce passage de cet article !), pour son accueil tout simple et si gentil au milieu de ses enfants... et ce dîner partagé dans une ambiance assurée par la petite dernière... sans oublier les autres !

Confiance : ce second mot rime avec le premier, non selon les règles de la poésie classique, mais selon les règles de la vie quotidienne, certes parfois moins poétique... mais il existe quelques moments où la poésie serait le seul moyen adéquat pour en exprimer la beauté. Désolé, je ne suis pas poète, je ferai sans...
Depuis que je suis séminariste, et même depuis le moment où j'ai commencé à annoncer mon entrée au séminaire, je suis frappé de la profonde confiance avec laquelle nombre de personnes, même parfois très loin de l'Eglise, parfois très loin de Dieu, se confient à moi. Il y aurait beaucoup de raisons à cela, ne serait-ce peut-être que parce que beaucoup ont continué à me faire confiance malgré ma faiblesse déjà bien connue. Mais j'y vois aussi quelque chose d'autre, qui me confère une responsabilité qui ne peut être portée qu'avec la grâce de Dieu, au jour le jour, et dans une grande humilité : certains, malgré la rude écorce de ma nature pas toujours d'une douceur évangélique, voient, à cause de l'appel que j'ai reçu et auquel je tâche de répondre de tout mon coeur et de toute ma vie, dès maintenant, quelque chose de l'homme de Dieu en moi. Un type en qui on peut avoir confiance pour cela. Même si on ne sait pas trop à quoi ou à qui on le doit...
Les enfants font toujours confiance. Enfin, bien souvent... mais que leurs parents me fassent confiance, que ce soient dans les familles où je suis accueilli et où je joue, à chaque fois que j'y suis convié et pour peu que ce soit possible, avec les enfants, où je prends le temps de les écouter et de répondre à leurs questions, ou bien même - ça m'est arrivé en paroisse - les parents d'enfants jouant dans la rue que je rejoins pour un foot, puis deux, avec qui je lie amitié et à qui je finis par raconter des histoires étranges et splendides : l'archange qui vient trouver une petite jeune fille dans un village paumé d'un petit pays qui ne paie pas de mine, et qui lui annonce qu'elle aura un enfant qui sauvera le monde, ou pourquoi (c'est lié) le coeur de la même jeune fille est aujourd'hui représenté transpercé par un glaive alors que celui de son fils est couronné d'épines et surmonté d'une croix... Mes lecteurs savent sans doute quelle honteuse publicité l'on fait - en ce moment même dans un film dont la photo d'annonce même est dégoûtante - autour des prêtres et des enfants, et ceux qui me connaissent savent quelle profonde blessure cela peut laisser dans le coeur d'un homme qui donne sa vie, célibataire, qui n'aura pas d'enfants alors même que cela a été (et est toujours) le plus gros sacrifice qu'il puisse faire... Sacrifice joyeux, plein de confiance, mais sacrifice tout de même ! Je suis admiratif et profondément reconnaissant de la confiance qu'on peut me faire, notamment sur ce plan-là. Je rends grâce à Dieu pour cela et j'en remercie de tout mon coeur tous ceux qui, malgré ma faiblesse, malgré mes insuffisances, mes défauts, me font confiance et font confiance au Seigneur pour qu'il fasse de moi un jour un prêtre selon son coeur.

Deo gratias ! Merci Seigneur ! Merci à tous aussi, et en même temps, car ces deux mercis ne sauraient entrer en concurrence... Accueil et confiance, deux mots qui, grâce à vous et à tous ceux qui me les ont rendus concrets, signifient beaucoup pour moi.
Le saviez-vous ? Accueil et confiance se conjuguent aussi avec Dieu : accueil de la grâce divine, et confiance en son amour et en sa force pour ma mission, présente et future.